Déductibilité des frais de gestion

C’est dans la récente décision Immeubles C.R.K.C. Inc. c. Agence du revenu du Canada1 que la Cour du Québec revoit la jurisprudence quant à la déductibilité des frais de gestion.


Les faits

La Demanderesse Les Immeubles C.R.K.C. Inc. (ci-après « C.R.K.C.») a déduit pour chacune des années en litige soit pour l’exercice financier se terminant le 30 juin 2013 et le 30 juin 2024 et le 30 juin 2015 un montant de 900 000$ en tant que frais de gestion.

Robert Carsley est le seul et unique actionnaire de la société Brooksam et Brooksam est la seule actionnaire de C.R.K.C. Le 12 avril 2012, une convention de gestion est intervenue entre Brooksam et C.R.K.C. Cette convention prévoit que Brooksam fourni des services de gestion dont les honoraires sont fixés au montant annuel de 900 000$ plus les taxes applicables.

Selon C.R.K.C., Brooksam s’occupait du 555 Chabanel (Garment District ou la Cité du Monde) et de la gestion des autres actifs, dont un terrain sur la rue Meilleur.

La position des parties

L’Agence du Revenu du Québec (ci-après «ARQ») a accepté un montant de 200 000$ par année, mais refusé 700 000$ au motif que la dépense est déraisonnable. Également, l’ARQ refuse les Remboursements de la taxe sur les intrants (RTI) s’élevant à 139 650$ en lien avec les paiements annuels des frais de gestion.

L’ARQ plaide que C.R.K.C. n’a soumis aucune preuve pour justifier la raisonnabilité de la dépense, que les factures soumises ne comportent aucune précision et qu’aucune «base de calcul» n’a été fournie.

L’ARQ démontre également l’énorme avantage fiscal dont l’actionnaire de la compagnie de gestion et son groupe corporatif ont pu retirer : «En termes simples, des revenus annuels de 900 000$ (ou de 700 000$) se retrouvaient ainsi libres d’imposition entre les mains de C.R.K.C. pour chacune des années d’imposition».2

Pour sa part, C.R.K.C. plaide que les montants sont raisonnables et suffisamment justifiés et qu’il n’existe aucune obligation légale en droit fiscal qui impose ou limite une façon de rendre et de rémunérer les services de gestion.

La décision

Le Tribunal effectue une revue de la jurisprudence quant aux critères de dépenses admissibles et souligne que pour les services de gestion la contribuable doit prouver, par une preuve probante et suffisante que les services ont été rendus.

Citant la décision de principe de la Cour d’appel Gervais Auto Inc. c. Agence du Revenu du Québec3, le juge rappelle que le fardeau C.R.C.K. était de «démolir» la prémisse essentielle de la base de la cotisation et de présenter une preuve prima facie de la raisonnabilité des frais de gestion de 900 000$.

Le Tribunal conclut qu’il ne doit pas uniquement vérifier «qu’une personne d’affaires raisonnable, ayant à l’esprit uniquement les intérêts commerciaux de l’entreprise, aurait accepté de payer les montants en litige, il doit aussi pouvoir conclure que les montants payés sont raisonnables dans les circonstances pertinentes»4

Le Tribunal rejette la position de C.R.K.C. essentiellement, car elle n’a pas fait la preuve assez étoffée que les frais de gestion étaient raisonnables.

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  1. 2024 QCCQ 1700 https://www.canlii.org/fr/qc/qccq/doc/2024/2024qccq1700/2024qccq1700.pdf ↩︎
  2. 2024 QCCQ 1700, par. 51 ↩︎
  3. 2021 QCCA 459, https://www.canlii.org/fr/qc/qcca/doc/2021/2021qcca459/2021qcca459.html?autocompleteStr=gervais%20auto&autocompletePos=1&resultId=bf3ef5bac1d6434a94d9e0918a5cf6e9&searchId=2024-06-10T14:46:15:752/35310a7885454225beb9d73d1bb0bc28#document ↩︎
  4. 2024 QCCQ 1700, par. 109 ↩︎
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